Premiers conseils pour lire Marivaux

Agrégation 2019, Marivaux
J.-L. Martine

C’est le théâtre de Marivaux qui est cette année au programme, avec les trois pièces suivantes (redisposées ici dans l’ordre de leur écriture) : 
-    La Double inconstance, édition de Christophe Martin, Paris, Flammarion, collection GF, 1996 ;
-    La Fausse suivante, édition de Pierre Malandain, Paris, Le Livre de Poche, collection Théâtre de poche, 1999 ;
-    La Dispute, édition de Sylvie Dervaux-Bourdon, Paris, Gallimard, collection Folioplus classiques, 2009. 

La relative minceur des œuvres théâtrales conduit les concepteurs du programme annuel à proposer des assemblages qui ajoutent à la nécessité de connaître et de comprendre chacune des pièces qui le composent celle de devoir penser leur association. Ainsi, dans l’immense œuvre de Marivaux, il nous est proposé de relier, autant que faire se pourra, deux comédies en trois actes, proches dans le temps de leur conception mais très différentes dans leur propos et leur ton (La Double inconstance, jouée en 1723 et La Fausse suivante, représentée l’année suivante) et une petite comédie en un acte, bien plus tardive, puisque jouée (une seule fois) au théâtre français en 1744 (La dispute). Le travail qui nous incombe alors est double : il s’agit de comprendre chacun de ces textes pour lui-même et en même temps de penser les effets produits par leur rapprochement.

Bien entendu, votre travail cet été devra essentiellement consister dans la lecture attentive des trois pièces, dont vous devrez maîtriser les grandes structures (intrigue, agencement, personnages, etc.) Faites des schémas, des plans, actes après actes, scène après scène, de manière à pouvoir vous promener aisément dans les œuvres. A côté de ce travail vous pouvez commencer à poser les jalons qui permettront de réfléchir aux relations entre les comédies : thèmes (l’inconstance, le secret et le masque, les manigances sentimentales, le procès satirique et la critique sociale…), personnages (maîtres, domestiques, femmes, innocents et roués…), structures, discours, passions, temps et espace, objets, etc. Essayez ainsi de commencer à penser les similitudes et les différences qui vous fourniront peu à peu les éléments à partir desquels vous pourrez commencer à disserter sur l’ensemble du corpus.

Par ailleurs, plutôt que de lire dès maintenant des ouvrages critiques (l’appareil qui accompagne chaque édition suffit amplement à votre premier travail), il est utile de lire d’autres textes de Marivaux. Ainsi, le thème central de La Dispute (l’inconstance et la découverte du sentiment) renvoie à celui de La Double inconstance (le chassé-croisé final), mais aussi à Arlequin poli par l’amour (1720) et à La Surprise de l’amour (1722). On lira également avec utilité les œuvres de Marivaux, rassemblées dans l’édition des Journaux (en deux tomes chez GF), et particulièrement les feuilles du Cabinet du philosophe ainsi que celles du Spectateur français (Journaux I, GF, 2010). La fausse suivante, qui accorde une large place au masque et au secret, peut se trouver éclairée par la lecture du Prince travesti ainsi que par celle du Triomphe de l’amour. Il sera également utile de regarder un peu du côté des roman de Marivaux, dont je vous enverrai des extraits (notamment de La Vie de Marianne).

Enfin, s’il vous reste du temps, voici quelques ouvrages critiques qui vous donneront des éléments pour élargir et approfondir ces premières perspectives : 

H. Coulet et M. Gilot, Marivaux un humanisme expérimental, Larousse, 1973
F. Deloffre, Une préciosité nouvelle : Marivaux et le marivaudage, Colin, 1955,
J. Goldzink, Comique et comédie au siècle des Lumières, L’Harmattan, 2000, et particulièrement les parties consacrées à « L’archipel Marivaux » (pages 169 et suivantes). Si vous n’en lisez qu’un, lisez celui-là. 
Françoise Rubellin, Marivaux dramaturge, La Double inconstance, Le Jeu de l’amour et du hasard, Champion2009. Lisez les éléments sur le théâtre italien et les parties sur La Double inconstance. 

Pour terminer, je vous invite à venir parfois consulter le site sur lequel je déposerai dans le courant de l’été, avant l’ouverture de la plateforme du CFOAD, des documents utiles (extraits d’œuvres – notamment des Journaux et de La vie de Marianne – articles, etc. :  jlma.over-blog.com.